
Edité par notre Bénévole Lhoucine BENLAIL Directeur Officiel et le chef de la rédaction ALY BAKKALI diplomaticnews.net
Sources : Jeune Afrique, témoignages judiciaires, sources proches du dossier.

Casablanca, le 14 février 2024 – « Les choses sérieuses ont enfin démarré ! » C’est par ces mots que des avocats et journalistes présents aux abords de la Cour d’appel de Casablanca ont résumé l’audience du procès retentissant de l’affaire dite du « Pablo Escobar du Sahara ». Ouvert depuis le 23 mai 2024, ce procès implique 25 individus, dont deux figures éminentes du Parti authenticité et modernité (PAM), l’un des principaux partis politiques marocains. Une affaire aux ramifications tentaculaires, mêlant trafic international de drogue, complicités étatiques et spoliations immobilières, révélée en août 2023 par Jeune Afrique.

El Hadj Ahmed Ben Ibrahim : le baron de la drogue qui défie le système
Surnommé le « Pablo Escobar du Sahara » ou simplement « Le Malien », El Hadj Ahmed Ben Ibrahim est au cœur de la tourmente. Ce narcotrafiquant, considéré comme l’un des plus redoutés d’Afrique, a bâti son empire entre le Sahel et le Maroc, organisant des convois de cocaïne et de haschich depuis Kidal (Mali) jusqu’à Casablanca. Arrêté en 2019 et incarcéré depuis dans une prison marocaine, il a choisi de retourner sa veste : il dénonce désormais ses anciens complices, qu’il accuse de l’avoir « trahi ».



Dans un revirement spectaculaire, Ben Ibrahim s’est également érigé en symbole inattendu des victimes de spoliations immobilières, un fléau qui touche des centaines de Marocains. « En plus d’avoir été trahi, je suis devenu malgré moi le représentant de ceux qu’on a dépouillés », aurait-il déclaré devant les juges. Une posture qui complexifie davantage une affaire déjà hautement politisée.
Des accusés au sommet de l’échiquier politique
Parmi les 25 inculpés figurent des personnalités influentes, notamment Saïd Naciri, président du Wydad Athletic Club (WAC) et du conseil préfectoral de Casablanca (PAM), ainsi que Abdenabi Bioui, président du conseil régional. Leur implication présumée dans un réseau de corruption et de blanchiment d’argent lié au narcotrafic jette une lumière crue sur les collusions entre crime organisé et sphère politique.
Les accusations portent sur un système sophistiqué de complicités au « plus haut niveau », permettant le transit de drogues via des routes sécurisées, mais aussi la confiscation illégale de biens immobiliers. Selon des sources judiciaires, Ben Ibrahim aurait fourni des preuves accablantes, dont des enregistrements et des documents financiers, mettant en cause des responsables marocains.
Un procès aux enjeux multiples
Au-delà du narcotrafic, le procès révèle une crise de confiance dans les institutions. Les victimes de spoliations immobilières, souvent impuissantes face à des réseaux protégés, voient en Ben Ibrahim un improbable porte-voix. « Son témoignage pourrait faire tomber des murs », souligne un avocat des parties civiles.
Pour le PAM, parti déjà affaibli par des scandales récurrents, l’affaire est un coup dur. Les prochains mois détermineront si la justice marocaine, souvent critiquée pour son opacité, parviendra à traduire en condamnations les révélations du « Malien ».
Conclusion : l’ombre d’un scandale d’État
Alors que le procès s’annonce marathon, il pose une question cruciale : jusqu’où montent les complicités ? Entre règlements de comptes au sein du crime organisé et lutte pour la transparence, le Maroc vit un moment charnière. Les répercussions pourraient redéfinir les équilibres politiques et judiciaires du royaume, sous le regard attentif d’une société civile désormais en quête de vérité.
À suivre.