Édité par notre Bénévole Lhoucine BENLAIL Directeur Officiel Diplomaticnews.net
Après une année de travail, le Conseil musulman de Belgique (CMB) tire un premier bilan positif. Il a été reconnu en 2022 par l’ex-ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD) comme l’organe représentatif provisoire du culte islamique. Provisoire parce que sa mission est de mettre en place un organe définitif qui remplacera le controversé Exécutif des musulmans de Belgique (EMB). Cet Exécutif avait perdu sa reconnaissance en 2022, par une décision de M. Van Quickenborne.
À l’époque, si un membre du conseil d’administration d’une mosquée ne plaisait pas à l’Exécutif des musulmans de Belgique, c’était silence radio et son dossier pour être reconnue par l’État n’avançait plus.
Les motifs ne manquaient pas : ingérences étrangères, pouvoir oligarchique, manque de transparence dans les processus décisionnels (désignation des imams, désignation des enseignants,…) Des problématiques constatées sur le terrain par Michaël Privot, islamologue et secrétaire du CMB. “À l’époque, si un membre du conseil d’administration d’une mosquée ne plaisait pas à l’Exécutif des musulmans de Belgique, c’était silence radio et son dossier pour être reconnue par l’État n’avançait plus.”
Sur ces questions, le Conseil des musulmans se félicite. “La politique des copains, c’est terminé. En tant qu’organe chef de culte, on n’est pas là pour avoir des chouchous. On travaille pour l’ensemble de la communauté, même pour les mosquées non reconnues. La méfiance à l’égard de l’EMB était très ancrée.”
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Une guerre de pouvoir
Deux fédérations ne veulent cependant pas être représentées par le futur organe. “Ce sont les deux grosses fédérations turques : Diyânet, qui dépend de l’ambassade de Turquie, et Milli Gorus. Ces deux fédérations représentent 60 % à 70 % des musulmans turcs de Belgique, soit un peu moins d’un tiers des musulmans de Belgique”, explique le Dr Privot.
Et selon lui, si elles refusent de reconnaître le nouvel organe représentatif, c’est en raison de leur frustration et de leur volonté de pouvoir. “Ces deux fédérations avaient mis l’Exécutif des musulmans sous leur coupe, elles détenaient quasiment tout le pouvoir. Elles ont introduit un recours au Conseil d’État pour contester notre reconnaissance comme organe représentatif du culte musulman. Mais l’auditeur du Conseil d’État a clairement dit que leur demande est insensée, puisque l’Exécutif n’existe plus”, révèle l’islamologue.
“Dans tous les cas, ils seront toujours les bienvenus pour siéger à l’assemblée générale, et leurs intérêts sont connus et pris en compte dans le nouvel organe.”
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Une assemblée générale qui devrait être composée d’ici janvier prochain. S’ensuivront l’élection d’un nouveau conseil d’administration, la passation de pouvoir et, comme l’espère sa présidente, la reconnaissance du nouvel organe d’ici juin 2025.
Tout est bloqué par manque de courage politique. Les services religieux évangéliques-protestants et orthodoxes sont également victimes de cette politique défaillante.
D’ici-là, les défis à relever restent nombreux. Pour ne citer que celui-ci, l’épineuse question de la reconnaissance des mosquées. En Flandre, la majorité des dossiers qui ont été soumis ont été jugés recevables. Pourtant, rien ne bouge. “Tout est bloqué par manque de courage politique. Les services religieux évangéliques-protestants et orthodoxes sont également victimes de cette politique défaillante”, regrette Michael Privot. “La ministre de l’Intérieur a trouvé que le conflit qui oppose Israël et le Hamas justifiait un nouveau cycle de screening par la Sûreté de l’État. Screening qui avait été réalisé dans les deux années précédentes. Ce n’est qu’un prétexte”, dénonce-t-il. “À Bruxelles, nous sommes aussi en attente de réponses, et au niveau Wallon, certains impératifs administratifs sont bien trop coûteux. On aimerait se conformer aux normes mais on ne se sent pas soutenus par la Région wallonne à ce niveau”, conclut-il.
Davantage de femmes dans les conseils d’administration des mosquées ?
D’ici 2025, le nombre de femmes dans les conseils d’administration doit atteindre minimum un tiers des membres. Pour ce faire, un comité d’aide sera déployé à la rentrée par le Conseil des musulmans de Belgique (CMB). “Sur le terrain, cette mesure est bien accueillie. Petit à petit, on constate que quelques femmes rejoignent des conseils d’administration”, se réjouit Michaël Privot. ” Cela dit, on peut se poser la question de leur participation effective.”
Si de nombreuses femmes sont actives dans la communauté religieuse, nombre d’entre elles n’osent pas rejoindre le CA. “Certaines ont peur de subir des critiques ou que leur mari soit visé parce qu’elles s’asseyent à la même table que des hommes”, constate-t-il.
Ces femmes doivent parfois honorer leur engagement professionnel et l’éducation de leurs enfants. “Logistiquement, il faut mettre des choses en place. Changer l’heure des réunions pour qu’elles ne se fassent plus en soirées, proposer des gardes d’enfants…”, explique résolument l’islamologue.